JEAN D’ORMESSON – C’EST UNE CHOSE ETRANGE A LA FIN QUE LE MONDE

“La science décrypte le rêve et elle en fait partie. Elle croît l’emporter sur lui, l’expliquer, le conquérir. Elle est un rêve dans le rêve. Aussi fort, aussi puissant. Peut-être plus puissant encore et en tout cas plus cohérent que le rêve dont elle est le rêve. Mais emporté par lui.

Ce livre est une sorte de Café du Commerce de la cosmologie et de l’histoire du monde. L’auteur est mû par l’étonnement et l’admiration. Le spectacle du monde le surprend, l’enchante et le remplit d’une allégresse terrifiée. Un discours métaphysique et ontologique d’un homme à la fin de son parcours évoquant, dans trois parties distinctes, l’histoire du Monde et des hommes, un rêve éveillé et sur sa fin, la mort.

Ce qu’il y a de plus incompréhensible, c’est que le monde soit compréhensible. Albert Einstein (1879-1955)

En 120 pages, Jean d’Ormesson trace d’une plume brillante, nostalgique et cultivée la création du Monde, le fil de l’histoire des civilisations jusqu’à nos jours, les découvertes scientifiques et nos croyances. Cette passionnante tapisserie du Monde est alternée avec les remarques du Vieux – Dieu ? –, lisant au-dessus de l’épaule de l’auteur et réagissant çà et là à nos certitudes humaines. Un philosophe inscrit “Dieu est mort, signé Nietzsche” et le blasphème est modifié en “Nietzsche est mort, signé Dieu”. Cette figure de style permet à d’Ormesson de se mettre au centre du jeu et d’apporter deux regards sur cette histoire de 14 milliards d’années.

Puis 90 pages d’un rêve éveillé dans le roman du monde passant d’un sujet à un autre le temps, Dieu, l’être, la science, la réalité, le pouvoir, la chance, l’avenir, les livres…“J’ai beaucoup aimé ce monde que tant de grands esprits ont tenté de comprendre. Je n’avais pas l’ambition de percer ses secrets. Je ne l’ai jamais accusé, je ne l’ai jamais calomnié, je n’ai jamais cherché à le fuir ni à le dénigrer : je m’entendais bien avec lui. J’ai surtout aimé m’y promener.

Et ces quelques très belles pages, sans frayeur excessive, d’un ton détaché, sur la mort, sur sa mort avec cette seule certitude, que nous ne pouvons rien en dire.

Très beau roman que ce roman du monde, cet hymne à la vie qui saura trouver son lectorat tant Jean d’Ormesson a su trouver un ton enjoué et mélancolique, gai et troublé.

Robert Laffont, 2010, 292 pages,21€

Lectori salutem, Patrick

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