“Inspecteur, si vous n’êtes pas capable de résoudre un crime qui s’est déroulé il y a une semaine, je doute que vous puissiez trouver la clé d’un hypothétique vol qui se serait produit avant 1926.”
Claude Monet disparu, ses 272 Nymphéas, peints jusqu’à n’être plus que l’idée de leur reflet, les jardins et le dominant donjon, le moulin de Chennevières et son vif bief, le village de Giverny lui-même illustrent le souvenir du génie et offrent au romancier un cadre enchanteur pour un huis clos meurtrier.
Si Robert-Kempf a pu dire en 1908 qu’“avec Monet, nous ne voyons pas le monde réel, mais nous en saisissons les apparences”, paraphrasons car, avec Bussi en 2010, dans ce huis-clos à Giverny, nous ne voyons pas les criminels réels mais nous n’en saisissons, malheureusement, que les apparences.
Suite à une rencontre en les locaux des Presses de la Cité, Michel Bussi m’offre cet ouvrage, le dédicace, faisant référence à notre échange à propos de “Ne lâche pas ma main” que j’avais tant aimé, m’interpellant avec trois questions : “Un nouveau roman ? Un nouveau style ? Une nouvelle construction ? ”
- Nouveau roman ? Absolument. Rien de commun mis à part la qualité de l’écriture.
- Nouveau style ? Etonnement oui. La langue utilisée pour “Ne lâche pas ma main” était volontairement relâchée, accompagnant le coté détendu des vacanciers à la Réunion. Ici, à la limite de la Normandie et de l’Ile de France, tout en restant délicieusement simple, Michel Bussi utilise un style plus soutenu convenant mieux à la belle institutrice, au Don Juan commissaire de police, à la veuve éplorée ou encore à cette vieille dame en noir cachée à l’abri des regards dans son donjon veillant sur les crimes et mystères endeuillant Giverny.
- Nouvelle construction ? Il n’est pas peu dire que Michel Bussi aura fait preuve d’imagination. Peu nombreux seront ceux qui auront trouvé le nom du ou des coupables avant que le décide l’écrivain. Chapeau bas.
Lieu : Le village de Giverny, deux voies parallèles, la rue Claude Monet et la D5 ou chemin du Roy, les jardins et l’Epte et son bief envahis par nos amis les touristes et les peintres amateurs.
Durée : Treize jours.
Les personnages : Le plus riche du village décède brutalement. Interviennent deux inspecteurs, l’un sérieux, le deuxième vite amoureux car il faut aussi vous dire qu’au village, vivent trois femmes : la plus douée, la plus rusée et la plus déterminée.
Le candide : Neptune, berger allemand de huit ans.
Et les nymphéas, nénuphars ou waterlily…
“De la tour du moulin, au quatrième étage, derrière la fenêtre, on peut beaucoup mieux y observer tout ce qui se passe aux alentours. Et beaucoup plus discrètement.”
Ce livre policier vous mène par le bout du nez. Les deux inspecteurs, le beau Laurenc Sérénac, l’albigeois et le travailleur et fidèle Sylvio Bénavides, lèvent des lièvres : Trafic international de tableaux mené par la puissante fondation Théodore Robinson, le classique crime passionnel provoqué par la trop belle Stéphanie, la découverte d’un deuxième assassinat suggérant un tueur en série et cette carte postale trouvée dans la poche de la victime : “Bon anniversaire, 11 ans” avec cet énigmatique ver “Le crime de rêver je consens qu’on l’instaure”.
Si “Laurent Sérénac, les nerfs à vifs, tente péniblement d’animer le brainstorming pour lequel il a rassemblé toute son équipe au commissariat de Vernon”, vous aussi lecteur aurez bien besoin d’une tempête sous un crâne pour trouver l’évidence avant le mot fin.
Terres de France, Décembre 2010, 437 pages, 21€
Lectori salutem, Pikkendorff et