« Jeune homme, lourdement handicapé, paralysé de la tête aux pieds, souffrant de l’absence totale d’autonomie et de contrôle sphinctérien ainsi que de dysfonctionnement érectile fréquent, sans véhicule et résidant actuellement en centre de rééducation, désargenté et dépressif, n’ayant pas connu de relations sexuelles depuis nombreux mois, cherche jeune femme, belle, élancée, raffinée, vierge, blonde, et talentueuse, salariée avec un solide traitement ou profession libérale, bonne cuisinière et maîtresse de maison impeccable, à l’hygiène irréprochable, pour éveil à la sensualité et plus si affinité. Brune et rousse s’abstenir. ..Contacter le journal qui fera suivre. »
Une baffe, un réveil, un monde soigneusement caché apparait avec nos peurs et nos blessures. A longs jets d’une énergie communicative, aidé d’un décapant humour noir, Benoit Albiges projette grand la lumière sur nous-mêmes.
De quelle dose de vérité êtes-vous capable vous dirait Nietzsche ?
Parce que, comme le dit Jean-Marie Blas de Roblès, “la révolte est le seul acte véritable de liberté, et par conséquent de poésie« .
La révolte de Benoit Albiges, ce concentré d’énergie aux longues phrases, ces hauts geysers d’émotions vibrantes jusqu’au tréfonds de l’être, est un hymne à la liberté, une poésie déchirante avec sa violence contre soi, contre le hasard, contre les probabilités.
« Mais rapidement le handicap marquait au fer rouge le corps des esclaves qui lui appartenait. »
Vous trouverez en chapitre miroir deux vies, Solange l’infirmière et Daniel le tétra et JC son jumeau. Tout dire jusqu’au moindre mot, à la moindre idée, au moindre recoin de la mémoire, chaque moment est le dernier, une faim du temps.
« Il y a quelques années maintenant que mon corps se déforme sur un fauteuil électrique à 30 000 euros pièce et, de la même manière qu’on se fait à la séquestration ou à la vie au Rwanda, on se fait à ça aussi. A l’attente, à la frustration, à l’absence de stimulus et de sensation. »
Et l’institution, les mandarins, les infirmières…
« Le fait d’être payé, mal en général, pour porter assistance à autrui, à d’autres être humains vulnérables, permettait à chacun de braver sa propre nature, tête à tête devant le miroir de ses démons, ses blessures, ses fantasmes et réveillait soit la maman, soit la marâtre, soit le bon samaritain, soit le tortionnaire, de telle sorte que tout ce petit monde cohabitait, parfois dans la même personne, avec plus ou moins de réussite, les gentils tenant de réparer les dégâts des salauds dans une ronde hypocrite perpétuelle. »
Merci à Abeline Majorel de la Chroniques de la Rentrée littéraire qui m’a permis de découvrir cet incendie.
Les grands associations ou fondations impliquées dans la recherché sur le moelle épinière.
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Bravo à l’éditeur L’Harmattan, achetez Nocébo
Benoit Albiges <albiges@gmail.com>
L’Harmattan, 2012, 175 pages, 18€
Lectori salutem, Pikkendorff